samedi 14 février 2015

Faisons l'autodafé de notre manque d'ambition envers le livre papier !

Tous ceux qui lisent sur écran le savent : le livre numérique va tuer le livre papier tel qu'il existe aujourd'hui. Inexorablement. Parce qu'une liseuse peut contenir un nombre invraisemblable de ressources, parce que le téléchargement rend le document accessible dans la minute qui suit, parce que les bons conseils du libraire sont remplacés par ceux de milliers d'internautes parfaitement maîtres de leur sujet, parce les œuvres libres de droit deviennent accessibles d'un clic, parce que les formats électroniques permettent d'obtenir immédiatement la définition d'un mot, parce qu'un traité d'histoire peut désormais renvoyer à des sources consultables en direct sur internet, parce que l'écrivain s'auto-éditera beaucoup plus facilement ainsi,et, enfin, parce que les enfants sont déjà habitués à ce nouveau support et en perçoivent tous les avantages sans envisager un instant de s'en priver.

Est-ce tout ? J'imagine que non.... mais ça fait déjà beaucoup.

Le livre tel que nous le connaissons a été amoindri, vidé de sa substance pendant des décennies, probablement davantage. Le format poche a démocratisé, certes, mais il a anéanti tout ce qui faisait de l'objet une oeuvre en soi. Les couvertures ne sont que des morceaux de carton pathétiques autour de bouts de papier réduits au minimum. Les illustrations sont le plus souvent médiocres, ou franchement hideuses. Les quatrième de couverture oscillent entre le moyen et le honteux. J'ai chez moi un ouvrage fort connu dont le résumé en dit beaucoup trop, ce qui est fréquent, mais en plus le résumé comporte deux erreurs sur l'histoire !!!!!

Nous avons d'ores et déjà avili le format papier, nous avons accepté qu'il se réduise à un cadavre épuré de tout ce qui lui donnait vie et panache. De là à passer au numérique... Le fil est ténu, le fil n'existe pas. On passe de l'un à l'autre parce que le livre a évolué dans le sens de sa négation formelle. Plus de forme, donc dématérialisation !

Alors faut-il commencer à rassembler du bois sec pour préparer l'ultime autodafé? Faut-il regarder crever le livre physique en rigolant et en jetant des carrés d'allume-feu au milieu des braises ? Bien sûr que non. Car le papier a un avenir possible, un avenir extraordinaire pour peu que l'on se donne la peine de le laisser exister.

Revalorisons l'objet, bon sang !!!! Dès demain les éditeurs doivent travailler sur des concepts de couvertures étonnants, des formats inédits et tant d'autres choses... Nous sommes tous sensibles à l'odeur des livres, pourquoi ne pas développer cette approche ? Et le toucher, le visuel ! Un éditeur pourrait proposer l'intégrale des Harry Potter sous la forme d'un grimoire de 30 centimètres de haut. Un autre pourrait sortir ses ouvrages de science-fiction sur un format en métal, un autre proposerait la personnalisation à la demande, et d'autres encore développeraient tant et tant de formes qu'une simple librairie deviendrait l'endroit le plus fou et le plus inattendu que l'on puisse concevoir. Un endroit magique, peuplé d'objets merveilleux, de fond comme de forme.

Et le prix ? Mais la dématérialisation impliquera une baisse conséquente sur le livre numérique (ou ce sera du vol...). Je serai pour ma part ravi d'utiliser une partie de cette économie pour acquérir l'une de ces créations fantastiques : un LIVRE, rendu à sa grandeur, un LIVRE enfin revalorisé et aimé par ses lecteurs, une création originale et vivante qui cohabitera parfaitement avec son confrère numérique.

Faisons l'autodafé de notre manque d'ambition envers le livre papier ! Et son avenir sera assuré.

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